A Mdm. Anna Larssen
On respirait à peine dans cet air excité.
Elle était, là, debout, la petite empoissonneuse!
Remplissant toute la salle d’une odeur vénéneuse,
d’un parfum maladif, et traînant, et musqué.
Elle était vêtue d’une robe d’un vert corrodant,
d’un vert qu’ont les cieux nocturnes de l’automne,
inondés d’une brume de lune monotone . . .
Sa voix était chaude et secrète comme le vent
qui traîne les effluves des fleurs orientales,
ouvrant dans le soir leurs lourdes calices.
Elle était imprégnée d’essences et de vices.
Elle avait la pâleur des femmes fatales.
Elle était inconsciente et perverse: un enfant.
Elle faisait, comme en songe, sa malfaisante œuvre,
se tordait dans la danse, comme une couleuvre,
brûlée par la chaleur irritante des sens.
Oh, la douleur profonde de sa triste volupté!
La volupté mordante d’une lointaine race . . .
Oh, les yeux fixes et longs, les yeux morts de l’extase . . .
Oh, les mornes sanglots de sa triste volupté!
Les petites secousses d’un corps énervé!