Louis, voici le temps de respirer les roses,
Et d’ouvrir bruyamment les vitres longtemps closes;
Le temps d’admirer en rêvant
Tout ce que la nature a de beautés divines
Qui flottent sur les monts, les bois et les ravines,
Avec l’onde, l’ombre et le vent.
Louis voici le temps de reposer son âme
Dans ce calme sourire empreint de vague flamme
Qui rayonne au front du ciel pur;
De dilater son coeur ainsi qu’une eau qui fume,
Et d’en faire envoler la nuée et la brume
A travers le limpide azur!
O Dieu! que les amants sous les vertes feuillées
S’en aillent, par l’hiver pauvres ailes mouillées!
Qu’ils errent joyeux et vainqueurs!
Que le rossignol chante, oiseau dont la voix tendre
Contient de l’harmonie assez pour en répandre
Sur tout l’amour qui sort des coeurs!
Que, blé qui monte, enfant qui joue, eau qui murmure,
Fleur rose où le semeur rêve une pêche mûre,
Que tout semble rire ou prier!
Que le chevreau gourmand, furtif et plein de grâces,
De quelques arbre incliné mordant les feuilles basses,
Fasse accourir le chevrier!
Qu’on songe aux deuils passés en se disant: qu’était-ce?
Que rien sous le soleil ne garde de tristesse!
Qu’un nid chante sur les vieux troncs!
Nous, tandis que de joie au loin tout vibre et tremble,
Allons dans la forêt, et là, marchant ensemble,
Si vous voulez, nous songerons,
Nous songerons tous deux à cette belle fille
Qui dort là bas sous l’herbe où le bouton d’or brille,
Où l’oiseau cherche un grain de mil,
Et qui voulait avoir, et qui, triste chimère,
S’était fait cet hiver promettre par sa mère,
Une robe verte en avril.
Avril 1837