Mon ÂmeAir des Scythes et des Amazones C’est à table, quand je m’enivre De gaîté, de vin et d’amour, Qu’incertain du temps qui va suivre, J’aime à prévoir mon dernier jour.Il semble alors que mon âme me quitte.Adieu ! lui dis-je, à ce banquet joyeux :Ah ! sans regret, mon âme, partez vite ;En souriant remontez dans les cieux. Remontez, remontez dans les cieux. Vous prendrez la forme d’un ange ; De l’air vous parcourrez les champs. Votre joie, enfin sans mélange, Vous dictera les plus doux chants.L’aimable paix, que la terre a proscrite,Ceindra de fleurs votre front radieux.Ah ! sans regret, mon âme, partez vite ;En souriant remontez dans les cieux. Remontez, remontez dans les cieux. Vous avez vu tomber la gloire D’un Ilion trop insulté, Qui prit l’autel de la victoire Pour l’autel de la liberté.Vingt nations ont poussé de ThersiteJusqu’en nos murs le char injurieux.Ah ! sans regret, mon âme, partez vite ;En souriant remontez dans les cieux. Remontez, remontez dans les cieux. Cherchez au dessus des orages Tant de Français morts à propos, Qui, se dérobant aux outrages, Ont au ciel porté leurs drapeaux.Pour conjurer la foudre qu’on irrite,Unissez-vous à tous ces demi-dieux.Ah ! sans regret, mon âme, partez vite ;En souriant remontez dans les cieux. Remontez, remontez dans les cieux. La Liberté, vierge féconde, Règne aux cieux, qui vous sont ouverts. L’amour seul m’aidait en ce monde À traîner de pénibles fers.Mais, dès demain, je crains qu’il ne m’évite ;Pauvre captif, demain je serai vieux.Ah ! sans regret, mon âme, partez vite ;En souriant remontez dans les cieux. Remontez, remontez dans les cieux. N’attendez plus, partez, mon âme, Doux rayon de l’astre éternel ! Mais passez des bras d’une femme Au sein d’un Dieu tout paternel.L’aï pétille à défaut d’eau bénite ;De vrais amis viennent fermer mes yeux.Ah ! sans regret, mon âme, partez vite ;En souriant remontez dans les cieux. Remontez, remontez dans les cieux.